Sébastien Lecornu, le ministre des outre-mer, est arrivé aux Antilles pour rencontrer les élus

Le ministre des outre-mer, Sébastien Lecornu, est arrivé dimanche 28 novembre aux Antilles, où il se rend d’abord à la Guadeloupe puis à la Martinique, après avoir salué « un retour notable au calme » dans la nuit de samedi à dimanche dans ces deux territoires.

Cette visite a lieu après plus d’une semaine de violences et d’émeutes dans ces îles françaises des Caraïbes, en proie à un mouvement de contestation né de l’obligation de la vaccination contre le Covid-19 pour les soignants et les pompiers. La crise s’est ensuite étendue à des revendications politiques et sociales, notamment contre la vie chère.

Le ministre, qui a atterri en milieu d’après-midi, a précisé aux médias présents à Baie-Mahault, qu’il rencontrerait, lundi matin, à la sous-préfecture de Guadeloupe, à Pointe-à-Pitre, « une dizaine de personnes » issues de l’intersyndicale, « pour échanger sur les revendications sanitaires ». Il a répété que l’obligation vaccinale, repoussée au 31 décembre, ne serait pas levée : « Les lois de la République ont vocation à s’appliquer » dans les Antilles françaises.

« Je ne suis pas venu ici pour incarner un Etat faible, mais [je suis venu pour incarner] aussi évidemment un Etat qui dialogue », a ajouté M. Lecornu, en précisant que « la main [était] tendue, néanmoins ça reste une main de fermeté ».

Un accord de principe en Martinique

Le ministère a fait savoir que M. Lecornu sera de retour mercredi, à Paris. Selon Max Evariste, du syndicat Force ouvrière (FO), l’intersyndicale « ne peut pas imaginer qu’il y aura des décisions de prises [lors de la visite], puisqu’il ne vient qu’une journée ».

L’intersyndicale souhaite que « l’ensemble » des organisations participent à la réunion et réclame des « vraies négociations », la « réintégration des personnes suspendues » avec tous leurs droits, mais également la « libération de tous ceux qui ont été condamnés » après les violences. Cette dernière demande a « plus que choqué » le ministre des outre-mer, qui a répété que les personnels rétifs à la vaccination seraient accompagnés pour « créer les conditions de leur mobilité professionnelles ». Ces négociations doivent débuter lundi.

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M. Lecornu doit aussi s’entretenir lundi, à la Guadeloupe, avec « des élus locaux et des acteurs économiques », a précisé le ministère, comme le lendemain à la Martinique, où il rencontrera également l’intersyndicale.

Cette dernière a signé avec l’Etat et les élus locaux un « accord de méthode » pour tenter de sortir de la crise, a expliqué la préfecture dans un communiqué. Le texte « fixe la date, le lieu et la composition de sept ateliers thématiques », dont la santé, la jeunesse et la vie chère, qui ont « pour objectif de trouver des solutions (…), en particulier sur les conditions de mise en œuvre de l’obligation vaccinale », précise la préfecture de Martinique.

A la Guadeloupe, la préfecture a confirmé que la nuit n’avait « pas vu d’incidents ou de heurts survenir ». « Les forces de sécurité ont continué à sécuriser l’ensemble du territoire et de dégager les axes de circulation, notamment en Grande-Terre », a-t-elle ajouté, précisant toutefois qu’une interpellation avait eu lieu.

En Martinique, des sources policières ont signalé des barricades « avec des jets de projectiles, dont des cocktails Molotov, sur des gendarmes ». Un individu a été arrêté après avoir incendié un véhicule, et un autre, « pour refus d’obtempérer et non-respect du couvre-feu ».

A la Guadeloupe comme à la Martinique, distante de 120 kilomètres, les forces de l’ordre avaient essuyé des tirs par arme à feu les nuits précédentes.

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L’opposition multiplie les attaques contre le gouvernement

Entre 2 000 et 3 000 personnes ont participé, samedi 27 novembre, à une manifestation, partie du CHU de Pointe-à-Pitre, afin de demander la levée totale de l’obligation vaccinale pour les soignants et les pompiers.

Vendredi, dans une allocution télévisée aux Guadeloupéens, M. Lecornu a affirmé que le gouvernement était « prêt » à évoquer la question de davantage d’autonomie si cela pouvait permettre de « résoudre les vrais problèmes du quotidien des Guadeloupéens ». Selon lui, la question a été posée « en creux » par « certains élus » lors des négociations qui ont eu lieu au cours des derniers jours à la suite de l’éruption du mouvement de contestation.

Dans un communiqué, les élus guadeloupéens ont estimé, dimanche, que la « priorité actuelle » était « la sortie de crise » et que « la domiciliation locale du pouvoir de décision [était] une question qui [devait] être abordée en temps et en heure ».

Depuis l’annonce du ministre, l’opposition a multiplié les attaques contre le gouvernement. « C’est l’unité du pays qui est en cause », a protesté lundi Michel Barnier, candidat à l’investiture du parti Les Républicains à la présidentielle. « C’est de l’amateurisme, de la diversion », a renchéri son rival Xavier Bertrand, pour qui le gouvernement est « prêt à laisser démanteler » la France en « lâchant aujourd’hui la Guadeloupe ». Le ministre des outre-mer est « hors sol », a critiqué Mme Le Pen, candidate du Rassemblement national (RN) à la présidentielle, sur LCI.

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A gauche, pour le candidat écologiste Yannick Jadot, c’est aussi « une manière de divertir le débat » alors que « l’urgence, là, c’est de faire du social, d’investir dans les services publics… ». De son côté, la candidate du Parti socialiste (PS) et maire de Paris, Anne Hidalgo, avait dénoncé dimanche « un manque de considération », tandis que Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise) avait samedi jugé « stupéfiante » la « réponse de Macron » et appelé à ne parler statut que « le moment venu ».

Interrogé dans Le Journal du dimanche du 28 novembre, M. Lecornu a temporisé en disant que « l’autonomie, ce n’est certainement pas l’indépendance ». Cette autonomie « existe déjà pour certaines collectivités d’outre-mer à des degrés divers, le modèle le plus poussé étant, par exemple, la Polynésie », a encore expliqué le ministre.

Ce n’est « évidemment pas le débat sur l’indépendance » de la Gualeloupe, a confirmé le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, lundi sur BFM-TV en citant l’exemple de la Polynésie française à l’autonomie renforcée depuis 1996. La Polynésie « est un territoire pleinement français où nous avons nos armées (…), mais les compétences sociales, les compétences économiques sont la compétence du territoire », a-t-il dit. Ce sont « les élus de Guadeloupe qui ont demandé ce débat sur l’autonomie. On ne peut pas à la fois dire le gouvernement n’écoute pas les élus et quand il les écoute dire “il écoute trop les élus” », a enfin défendu Gérald Darmanin.

Le Monde avec AFP

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