La Barbade devient une république et se détache de la couronne britannique
La reine Elizabeth II a officiellement perdu un joyau de sa couronne, avec la prestation de serment, lundi 30 novembre soir, de la première présidente de l’histoire de la Barbade, la petite île des Caraïbes devenant ainsi une république. La souveraine a perdu son titre de chef de l’Etat lors d’une cérémonie à laquelle a assisté son fils le prince Charles.
Déjà indépendante du Royaume-Uni depuis 1966, l’île connue pour ses plages paradisiaques, son rhum et pour être le lieu de naissance de la superstar mondiale Rihanna, a célébré sa transition vers un régime républicain après quelque quatre siècles de sujétion au souverain britannique.
La nouvelle chef d’Etat, Sandra Mason, jusque-là gouverneure générale du pays et élue présidente en octobre au suffrage universel indirect, a prêté serment, à minuit lundi soir, dans la capitale, Bridgetown, lors d’une cérémonie officielle marquée également par le remplacement de l’étendard de la reine par le drapeau présidentiel.
« Moi, Sandra Prunella Mason, jure d’être fidèle et de porter une véritable allégeance à la Barbade conformément à la loi, avec l’aide de Dieu », a déclaré la nouvelle présidente en prêtant serment.
« Lien spécial du Commonwealth »
Cette cérémonie – en présence de Rihanna – n’était toutefois pas ouverte au public mais le couvre-feu dû à la pandémie a été suspendu pour que les habitants puissent profiter des festivités, dont des projections et des feux d’artifice à travers l’île.
La Barbade reste membre de l’organisation du Commonwealth, ainsi que l’a relevé le premier ministre britannique, Boris Johnson, dans un communiqué lundi. « Nous resterons des amis et alliés loyaux, en nous appuyant sur les affinités et connexions durables entre nos peuples et sur le lien spécial du Commonwealth », a-t-il écrit.
A la Barbade, le prince de Galles a été rattrapé par une polémique qui a éclos au cours du week-end sur des remarques qu’il aurait faites il y a quelques années à propos de la couleur de peau des futurs enfants du couple formé par son fils Harry et Meghan Markle. Ces remarques, rapportées dans un livre à paraître mardi, ont été démenties par les services du prince Charles : « Il s’agit de fiction et ne mérite pas d’autre commentaire », a déclaré un porte-parole de Clarence House.
Les questions de l’influence britannique et du racisme ont été déterminantes dans la décision de la Barbade de devenir une république, l’île étant encore marquée par l’héritage de plusieurs siècles d’esclavage. Des critiques visaient déjà l’invitation du prince Charles par la première ministre barbadienne, Mia Mottley, qui doit lui remettre la plus haute distinction de l’île, l’ordre de la Liberté (« Order of Freedom »).
« La famille royale britannique est coupable d’exploitation dans cette zone, et pourtant elle n’a présenté aucune excuse officielle ou forme de dédommagement pour les préjudices passés », estime Kristina Hinds, professeure de relations internationales à l’université des Indes occidentales à la Barbade.
Dépendance au tourisme
Certains habitants évoquent l’existence de problèmes plus urgents, notamment la crise économique causée par la pandémie de Covid-19, qui n’a fait que souligner la dépendance du pays au tourisme, en particulier issu du Royaume-Uni.
Avant l’émergence du virus, l’île aux eaux cristallines était visitée chaque année par plus d’un million de personnes. Le calme des rues habituellement animées de Bridgetown, le nombre dérisoire de visiteurs et une vie nocturne moribonde témoignent aujourd’hui des difficultés de cette perle des petites Antilles, qui compte environ 287 000 habitants.
Le chômage atteint près de 16 %, en hausse de 9 % par rapport aux années précédentes, en dépit de l’augmentation des emprunts gouvernementaux pour financer des travaux du secteur public et créer des emplois.